Rassemblons-nous autour d’un café.

Message aux électeurs du PS (et aux autres)

Je voudrais ici faire réfléchir sur une stratégie politique qui n’a rien de stratégique.

Il faudrait, dit-on, que le cinquième homme se range derrière le quatrième pour que le programme commun (j’aime bien le terme…) aux deux protagonistes puisse avoir une chance d’être mis en œuvre…

Mais de quoi s'agit-il exactement ?

1      « Mon programme il est beau ! », qu’ils disaient

Le constat initial est le suivant : A première vue, les programmes proposés par Benoît Hamon (BM) et par la France Insoumise (FI) représenté par J-Luc Mélenchon (JLM) semblent très voisins.

Il y a certes des différences qui peuvent paraître des points détails, mais qui ne le sont pas toujours. Par exemple, la question du revenu universel, qui peut être posée, ne paraît pas applicable en l’état dans le programme de la FI. Il y a aussi la question de l’Europe (j’y reviens ensuite), de la sortie du nucléaire (totale pour JLM, partielle pour BH), et plusieurs autres choses encore comme cette histoire de 6è république qui est dans les deux programmes mais abordée de manière très différente, JLM voulant une assemblée constituante alors que BH souhaite une… euh… souhaite.

Il y a donc des différences. C’est normal. Mais je préfère me focaliser sur les points communs, et ils sont nombreux. Pour résumer, il semble que BH et JLM visent le même objectif qui consiste à mettre en place une politique environnementale et sociale ambitieuse.

On pourrait longuement épiloguer sur les mesures prônés dans l’un et l’autre des programmes. Lesquelles sont meilleures ? Lesquelles sont applicables ? Etc. Ce n’est pas si important si l’on considère que BH comme JLM annoncent vouloir rompre avec la limite des 3% du PIB comme déficit public. Ce « dogme », car c’en est un (pourquoi 3% et pas 5% ?) doit donc être renversé. Mais comment y parvenir ?

Pour dire cela autrement, la mise en œuvre des programmes de BH et JLM sont tous-deux dépendants de ce dogme

BH annonce qu’il mettra en place une alliance inter-états, politique et sociale en vue d’imposer un moratoire sur le « pacte de stabilité » si cher à l’UE. OK, mais comment ? Il faut toujours l’unanimité pour sortir des traités par la voie légale et qui peut penser que BH pourrait y parvenir mieux que ses prédécesseurs ? Comment compte-t-il convaincre les allemands et bien d’autres états ? BH n’est pas Tom Cruise, cette mission semble impossible.

Sur cette question, la vision de JLM est tout autre. Un plan A qui propose de sortir des traités européens (d’ailleurs non ratifiés par le peuple et ratifiée ensuite par nos gouvernements), étant entendu que ce plan A serait assorti d’une menace de Frexit, autrement dit, une négociation dure que tout le monde connaîtrait à l’avance. Et en cas de refus des instances européennes, alors un plan B, lui aussi clairement annoncé. JLM n’est pas contre l’Europe mais contre l’Europe libérale qui a pris le pouvoir sur les peuples et, contrairement à BH, il montre comment y parvenir. On peut être contre cela, mais tout est dit, tout est annoncé, rien n’est caché.

2       « Rassemblez-vous ! », qu’ils disaient

Il est une deuxième question qui doit être évoquée. BH a interpellé JLM mais ne propose pas vraiment de plateforme commune. Juste une alliance pour gouverner. Mais dans le même temps, le même BM a rencontré Bernard Cazeneuve le 31/01/2017 et François Hollande le 02/02/2017. Son discours a largement changé entre ses déclarations durant la primaire et celles qu’on entend aujourd’hui. Il n’est plus vraiment question de « jeter le bébé avec l’eau du bain » mais plutôt de maintenir l’eau chaude dans le bain en attendant le nouveau bébé. Le frondeur a oublié sa fronde dans la poche de Manuel Valls et des autres. Et on peut le comprendre.

BH a en effet besoin du soutien du PS pour des tas de raisons, y compris organisationnelles. Par ailleurs, il n’est pas premier secrétaire du parti ; il ne décide pas des investitures. Il devra donc composer avec les élus PS, dont la plupart ont été ré-investis par l’actuelle direction, et sont donc dans la droite ligne du gouvernement actuel. Comment se rassembler dans ces conditions ? BH a-t-il un autre choix que de « droitiser » son discours ou, pire, de nous refaire le coup du discours du Bourget de 2011 en fustigeant la finance pour mieux l’apprivoiser ensuite ?

D’ailleurs, la fronde fut relative puisque aucune motion de censure n’a jamais été votée par lui ni par d’autres de ses collègues qui auraient permis de mettre l’un d’eux à la tête du gouvernement afin d’appliquer la politique dont il déplora, il n’y a pas si longtemps, qu’elle n’était pas celle annoncée aux Français.

Enfin, quid des "quelques" élus PS qui ont déjà choisi leur camp et ont rejoint Emmanuel Macron. Pourquoi la direction du PS ne les a-t-elle pas sommés, sous peine d’exclusion, de soutenir le candidat Hamon, comme elle l’avait assuré ? Et après les élections, si par extraordinaire BH était élu, ces élus adhèreront-ils à la politique de la-gauche-la-vraie prônée par BH.

Mais tout cela ne suffisant pas, il faudrait maintenant que JLM se range, qu’il rejoigne ce rassemblement hétéroclite déjà impossible au sein même du PS et de ses alliés d’hier.

         « Rangez-vous ! », qu’ils disaient !

Il y a quelques semaines, quand le PS était au plus bas dans les sondages, aucune voix ne s’élevait, ni au sein dudit parti, ni dans les médias, pour demander au PS de se ranger derrière JLM ou Macron, pourtant mieux placés dans lesdits sondages.

Mais la machine est en route (la machine à perdre ?). Les sondages (pour l’instant), indiquent le contraire et donc la FI et son candidat doivent se ranger…

Pourquoi ? Et si les sondages s’inversent demain, on fait le contraire ? Et s’ils se ré-inversent, on re-change ? Et s’ils se ré-ré-inversent, on re-re-change ?...

C’est absurde !

Alors voilà, JLM porte en lui l'échec d'une défaite soit-disant assurée, il a un égo surdimensionné, si on perd ce sera sa faute, il s’est autoproclamé, blabla, blabla, blabla. Ah oui, Macron s’est autoproclamé aussi mais bon, c’est pas grave ; en plus il est pas allé à la primaire mais c’est pas grave non plus. Et Hamon s’est autoproclamé aussi mais il est allé à la primaire. Et Valls s’est autoproclamé, a perdu la primaire et se met en retrait tout en créant un mouvement…

C’est absurde !

Le PS serait donc le soleil autour duquel tout un chacun doit tourner. Quel PS ? Celui de Cambadelis ? Celui de Valls, celui de Macron ou de Montebourg, celui de Ségolène, celui de Filloche ? Celui de Macron qui n’est pas au PS ? Autant de courants, mais des courants contraires.

C’est absurde !

Le PS n’existe plus. Ses électeurs oui !

          « Tu veux un café ? », qu’il demanda !

Après avoir dit que quoi qu’il arrive il y aurait un bulletin de vote Hamon pour la présidentielle (il aurait pas un égo surdimensionné, çui-là ? Ah non, pardon, pas lui), BH a proposé à JLM de discuter avec lui autour d’un café.

JLM a accepté l’un et l’autre. Je pense qu’il aime discuter et aussi qu’il aime le bon café. Mais JLM a aussi demandé dans une vidéo devenue « culte » sur sa chaîne youtube (https://youtu.be/tQIsWprmxDA) de faire un choix, tout simplement.

La question est donc clairement posée à BH : veut-il tourner la page ou non ?

C’est une manière de proposer une alliance mais pas une alliance simplement stratégique, une alliance sur le programme, sur les idées. On attend la réponse de BH.

Ensuite, pour ce qui est des hommes, nous verrons bien.

C’est pourquoi je parlais ci-dessus des électeurs qui eux aussi peuvent faire un choix, doivent faire un choix.

5      « Tu votais PS et maintenant ? » (ça fonctionne aussi pour ceux qui ne votaient pas PS)

Le programme de la France Insoumise a longuement mûri et il se tient. Il est logique, il est organisé, il est planifié, il est financé. C'est un tout.

Le programme de Benoît Hamon, partiellement copié sur celui de la FI (et tant mieux), part de postulats qui ne se produiront pas sans rupture (voir la première partie de ce papier). 

Car c'est bien le peuple qu'il faut rassembler ! Autour d'un vrai projet de société.

La question du vote utile va-t-elle, comme en 2012, nous faire douter, vous faire douter ?

A titre personnel, j'ai déjà joué la partie. J'ai voté "utile" en d'autres temps. En fait, j’ai voté « inutile » puisque mon vote n’a servi à rien. Ou à pas grand-chose.

Désormais et quoi qu’il arrive, je voterai pour un projet abouti, pour des idées, pour des valeurs.

Désormais, je ne voterai plus utile, je voterai humain.

Et vous ?

J-Luc Menet